Veille juridique en droit social – 21 septembre 2023
1 | Nouvelles règles en matière d’acquisition des congés payés durant les périodes d’arrêts de travail (Cassation sociale, 13 septembre 2023, n° 22-17.340 à 22-17.342 ; 22-17.638 ; 22-10.529 et 22-11.106) :
Par plusieurs arrêts du 13 septembre 20223, la Cour de cassation opère un revirement de jurisprudence majeur concernant les règles d’acquisition des congés payés durant les arrêts de travail pour maladie simple et les arrêts de travail pour accident du travail ou maladie professionnelle afin de se conformer droit européen.
Elle considère ainsi désormais que le salarié acquiert des droits à congés payés pendant les périodes de suspension de son contrat de travail pour cause de maladie non professionnelle ou pour cause de maladie professionnelle ou accident du travail au-delà d’un an ininterrompu.
A cette occasion, elle précise également que :
- Lorsque le salarié s’est trouvé dans l’impossibilité de prendre ses congés payés annuels au cours de l’année de référence en raison de l’exercice de son droit au congé parental, les congés payés acquis à la date du début du congé parental doivent être reportés après la date de reprise du travail.
- Le point de départ du délai de prescription de l’indemnité de congés payés doit être fixé à l’expiration de la période légale ou conventionnelle au cours de laquelle les congés payés auraient pu être pris dès lors que l’employeur justifie avoir accompli les diligences qui lui incombent légalement afin d’assurer au salarié la possibilité d’exercer effectivement son droit à congé.
2 | Nullité d’une clause de non-clause de non-concurrence prévoyant une possibilité de renouvellement unilatéral par l’employeur postérieurement à la rupture du contrat de travail (Cassation sociale, 13 septembre 2023, n°21-12.006) :
La clause insérée dans un contrat de travail aux termes de laquelle l’employeur se réserve seul la faculté, après la rupture du contrat de travail, de renouveler la durée de l’interdiction de concurrence pour une durée égale à la durée initiale est nulle.
Si les clauses de non-concurrence insérées dans les contrats de travail de vos salariés prévoient un renouvellement de la durée de l’interdiction, il est urgent de les modifier par un avenant au contrat de travail.
3 | Appréciation de la dispense de recherche de reclassement mentionnée sur l’avis du médecin du travail en cas d’inaptitude du salarié (Cassation sociale, 13 septembre 2023, n°22-12.970) :
Il résulte de l’article L. 1226-2-1 du Code du travail que l’employeur ne peut rompre le contrat de travail que s’il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l’article L. 1226-2 du Code du travail, soit du refus par le salarié de l’emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l’avis du médecin du travail que « tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé » ou que « l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi ».
Il s’ensuit que lorsque l’avis d’inaptitude du médecin du travail mentionne que « tout maintien du salarié dans un emploi dans cette entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé » et non pas que « tout maintien dans un emploi serait gravement préjudiciable à santé », l’employeur n’est pas dispensé de son obligation de rechercher un reclassement.
4 | Lanceur d’alerte : le signalement d’un salarié n’a pas nécessairement à être désintéressé (Cassation sociale, 13 septembre 2023, n°21-22.301) :
Le salarié qui relate ou témoigne de faits constitutifs d’un délit ou d’un crime dont il aurait eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions n’est pas soumis à l’exigence d’agir de manière désintéressée au sens de la Loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016.
Il ne peut donc être licencié pour ce motif, sauf mauvaise foi, laquelle ne peut résulter que de la connaissance de la fausseté des faits qu’il dénonce et non de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis.
5 | Recevabilité de la preuve d’un comportement fautif par des « clients mystères » (Cassation sociale, 6 septembre 2023, n°22-13.783) :
Le recours à des « clients mystères » est licite et la preuve d’une faute en résultant est recevable si le salarié a été préalablement informé de l’existence de ce dispositif d’investigation.
6 | Recevabilité de la preuve d’un comportement fautif par un dispositif de géolocalisation des véhicules (Cassation sociale, 6 septembre 2023, n°22-12.418) :
Une cour d’appel ne peut pas juger le licenciement fondé sur une faute grave en retenant que les déplacements injustifiés reprochés au salarié sont établis par les relevés de géolocalisation de son véhicule, procédé déclaré à la Cnil dans le but d’une géolocalisation des véhicules des employés et de la sécurité des biens et des personnes sur les sites, et dont le salarié a été informé par courrier recommandé avec accusé de réception, sans rechercher si ledit système installé sur le véhicule de fonction avait également pour finalité déclarée à la Cnil le contrôle de l’activité professionnelle et de la durée du travail et si le salarié avait été informé de l’utilisation de ce dispositif à cette fin.